L'homme acteur, l'éboulement du Char d'Osset:
Dans une première partie nous allons parler d'un éboulement
provoqué: la pointe du Char d'Osset.
Ce massif rocheux est situé dans la vallée de la Maurienne sur le territoire de la commune de saint Julien Mont-Denis. Le massif surplombe le village de Villarclément, c'est lui qui était
directement menacé par les chutes de blocs. Ce massif surplombe également la route départementale RD 79a qui relie Saint Julien aux hameaux d'altitude de Grenis, Montdenis et
Tourmentier. Des éboulements de plus ou moins grande envergure ont eu lieu de 2002 à 2008 jusqu'à ce que le risque devienne maximum et incontrôlable ... il faut faire quelque chose !
-Pourquoi a-t'on provoqué cet éboulement ?
Chronologie des évenements :
- décembre 2002, premières chutes de blocs qui atteignent la route.
- janvier 2003, deuxièmes chutes qui atteignent la route; le géologue, Laurent Muquet du bureau d'études IMSRN, découvre une masse instable de 130 000 m3, dont une colonne de 30 000 m3 qui
menace de s'écrouler à très court terme! Le Conseil général équipe alors la tête du versant de détecteurs de mouvement, des extensomètres, placés sur les fissures sommitales
du Char d'Osset. En même temps la commune fait construire un merlon de protection de huit mètres de hauteur; les travaux durent sept semaines pendant lesquelles les habitants de Villarclement
sont évacués.
Image:
les extensaumètres
Images : les detecteurs de chutes de blocs
- mars 2003, les extensomètres s'affolent, la Route Départementale 79a est fermée à la circulation... la colonne de 30 000 m3 s'effondre en seulement quelques heures, effondrement suivi
en direct par les géologues et les habitants! Les mouvements se calment ensuite et le système de surveillance est renforcé par des détecteurs de chutes de blocs (radars Dôpplers
visualisant les chutes de blocs, couplés à des capteurs sismiques) au droit des deux couloirs, reliés à des feux sur la RD 79A. De plus, des écrans de filets sont placés de part et d'autre
des feux pour protéger les éventuels automobilistes arrêtés aux feux. Enfin, le département réalise une piste de secours par Hermillon, non exposée aux chutes de blocs, et qui ne
sera ouverte qu'en cas de risques pour la RD 79A (la piste a des caractéristiques géométriques, notamment la pente, incompatible avec une circulation normale). Tout cela constitue des
mesures de protection.
Images : blocs sur la route après le premier éboulement
- de mars 2003 à mai 2008, le mouvement reste très actif et atteint un affaissement et un écartement global de trois mètres sur la pointe.
- mai 2008, les extensomètres s'affolent à nouveau, la vitesse de mouvement atteint trois centimètres par jour! La Route Départementale 79a est à nouveau fermée
et la piste de secours est activée. Le géologue détecte une masse instable de 50 000 m3 extrêmement fracturée et pouvant tomber à très court terme. Le problème est que maintenant
le système de surveillance ne permet plus de surveiller correctement la masse instable, et que la probabilité de départ se mesure en jours, en semaines ou en mois ...
La piste de secours étant difficilement praticable en hiver il faut trouver une solution rapidement. On envisage alors la possibilité d'éliminer la masse en la minant. Le massif est
tellement destructuré que la solution devient envisageable alors qu'elle ne l'était pas en 2003. Le Conseil général fait donc monter sur le site trois experts en minage, Mr Marguier, Mr
Vial et Mr Contini, qui confirment la possibilité du minage !
L'opération est lancée début juillet par la commune et le Conseil général et le marché de travaux attribué au groupement d'entreprises GTS pour le forage et SOFITER pour le
minage.
Images : Fissures
Image: blog pris dans les filets de prtotection quelques jours avant la décision.
Les travaux commencent le 15 septembre 2008 ...
-Techniques
et réalisations du minage:
Travaux préparatoires :
Les travaux préparatoires débutent par la sécurisation des accès. En effet, les travaux se font sur la pointe du Char d'Osset, inaccessible par la
route, l'accès se fait donc à pied sur plus de 20 minutes, via une arête terminale très aérienne. Cette dernière est équipée de filets anti-chute de part et d'autre du
cheminement.
Image : accés a la pointe de char d'Osset, que l'on voit dans le fond.
Les engins (pelle araignée, foreuse, compresseur, etc ...) et le matériel sont héliportés, notamment par un super-puma, hélicoptère unique dans l'aviation civile.
Image : Héliportage du compresseur
La pelle araignée est une pelle mécanique se déplaçant dans des pentes très raides grâce à deux roues et deux pattes articulées; elle permet de réaliser
une plate forme de travail sur la crête, de 5 mètres de large et de 40 mètres de long, pour faciliter la circulation et la mise en place de la foreuse.
Image : la pelle araignée
Les détecteurs de chutes de blocs existants au droit des couloirs sont démontés pour éviter que le tir ne les détériorent. Les écrans de filets, eux, sont
maintenus dans l'espoir qu'ils ne seront pas touchés (ou faiblement) par le tir et ainsi gagner du temps à la réouverture de la Route Départementale79A après tir.
Forage :
image : la foreuse et quelques membres de l'équipe de forgage.
Il faudra 1 mois et demi pour réaliser les dix-huit trous nécessaires, de trente à cinquante ètresm de profondeur, qui seront équipés d'un tubage pétrolier pour empêcher les
déformations jusqu'au jour du tir. Les équipes de forage travaillent pendant toute la période diurne (deux équipes se relaient). De nombreux aléas de foration ont ralenti fortement le
rythme, avec casse du moteur principal de la foreuse et casses également presque systématiquement du marteau fond de trou. Ces différents problèmes rencontrés sont liés à la nature très
déstructurée du rocher. Quelques trous n'ont pu être réalisés à la bonne profondeur en raison d'une veine de quartz impossible à traverser à trente mètres de profondeur.
Image : les tubages pétroliers
Image : les tubes pour forrrer
Image
: la tête de forrage
Minage :
Des essais de tir au travers les tubes pétroliers sont réalisés dans une piscine pour évaluer la perte d'énergie du tir. Les résultats ayant été concluants, le type d'explosif envisagé a pu
être appliqué au site.
Le chargement des trous a lieu la veille et se déroule sur sept heures avec une équipe de sept mineurs. Ainsi, 8,4 tonnes d'explosifs sont héliportés et descendus dans les trous.
Un cordeau détonant et trois détonateurs par trous sont nécessaires pour amorcer et être sûr que toutes les charges explosent.
Le site est gardienné toute la nuit (législation oblige).
Un plan d'évacuation, un périmètre de sécurité et un déroulement des opérations minute par minute sont définis par l'entreprise de minage et validés par tous les intervenants (Conseil
général, commune, entreprises, Préfecture, SNCF, autoroute, EDF etc...) en réunion en Préfecture quelques jours avant le tir.
-L'évènement:
Images : l'explosion
Le tir a eu lieu le lundi 27 octobre 2008 à 11h45 précise. Dans les heures précédentes, toutes les mesures de sécurités définies ont été mise en oeuvre :
- évacuation des habitants de Villard Clément,
- arrêt des turbines EDF,
- arrêt de la circulation sur les routes et sur l'autoroute,
- fermeture de tous les chemins pédestres pouvant être atteints par les projections,
- survol hélico du périmètre de sécurité pour s'assurer que personne n'est présent à l'intérieur.
Le tir a provoqué un nuage dense qui s'est écoulé dans les deux couloirs mais n'a pas atteint la RD 79A. Quelques blocs ont traversé cette dernière mais aucun n'est arrivé dans le merlon de
protection des habitations.
Plus de 50 000 m3 ont ainsi été pulvérisés éliminant pour plusieurs décennies le risque d'éboulement en masse sur la RD 79A et le village !
Environ trente minutes après le tir, les habitants de Villard Clément ont pu réintégrer leur domicile.
Images : blocs ayant atteind la route après le tir
-L'après éboulement:
Image : le char d'Osset après le tir
Le tir a permis d'éliminer le risque de départ en masse mais pas le risque de chutes de blocs. La surface après tir va se purger des éléments instables au cours du temps et de la météorologie, aussi ces chutes sont attendues pendant un certain temps au droit des deux couloirs. Cela dit, ce risque est revenu dans des proportions classiques que l'on sait traiter.
Les détecteurs ont été réinstallés dans les couloirs de façon à pouvoir démarrer les travaux de remise en état des écrans de filet en sécurité. Des vigies placées à des endroits ayant un bon visuel sur les couloirs surveillaient le chantier durant toute sa durée. Un écran de filet endommagé a été réparé, et un mur de protection avec des blocs béton sur trois mètres de hauteur a été réalisé le long de la chaussée, avec décaissement préalable du pied de versant pour constituer un piège à blocs à un endroit non sécurisé par des écrans de filets.
Ces travaux post-tir ont duré trois semaines au bout desquelles la RD 79A a pu enfin être réouverte à la circulation, soit six mois après sa fermeture.
D'autres coupures de la RD 79A sont possibles suivant l'importance des chutes de blocs, notamment après un épisode très pluvieux par exemple ou un cycle de gel-dégel mais ces coupures ne devraient pas durer dans le temps comme cette année.
-Presse et interview:
La presse est trés présente. Ici, le reportage de Tv 8 Mont Blanc sur cet événement.